«Ça me fait d'autant plus plaisir qu'on ne me l'a jamais dit.» Sacrée Chaîne parlementaire!
On dira qu'il faut du vice pour regarder la Chaîne parlementaire. Il y a de ça, mais le vice étant presque toujours récompensé, je suis tombée sur un gala! Martine Aubry et Philippe Sollers devisant sous l'autorité gracieuse de Sylvie Pierre-Brossolette, parlant de l'amour, des hommes, des femmes, du bonheur, du sens de la vie, de la mort. Autour d'eux, deux députés PS et un UDF faisaient un peu mieux que de la figuration intelligente. L'un d'eux reprocha à Sollers son «pessimisme» . Il ne doit pas le connaître. Sollers n'est pas pessimiste, il est désespéré, mais gaiement! Comme il faut! «Les intellectuels sont utiles, dit Martine, ils mettent le doigt là où ça fait mal.» Sollers se tailla un succès en disant : «Elle est sexy!» Eclat de rire de l'intéressée, qui dit avec sa belle simplicité: «Ça me fait d'autant plus plaisir qu'on ne me l'a jamais dit.» Elle peut le croire, il est orfèvre. La politique? Elle n'était pas au menu sinon en quelques mots, quand l'un des députés demanda : «Pourquoi vit-on?» «Pour changer la société, en faveur de chacun et de tous? Je suis volontariste», dit Martine Aubry, même si quelquefois, un jour de fatigue, le doute l'effleure. S'il y a beaucoup d'échanges aussi agréables sur la Chaîne parlementaire, elle se fera une réputation (Chaîne 110 sur le câble). Toujours hors des sentiers battus, il y a depuis longtemps sur Paris-Première une émission avec laquelle les aficionados du cinéma se sont constitué une belle collection vidéo. Mais tout le monde ne la connaît pas. Et c'est une source de plaisir. Il s'agit d'un entretien avec un grand personnage du cinéma ou de la scène, dans le cadre de l'Actor's Studio, la plus célèbre école d'art dramatique du monde. Tous ceux que nous avons aimés un jour y sont passés. Et ils sont interrogés devant les élèves de l'école. L'autre semaine c'était Faye Dunaway? Qui a oublié «Bonnie and Clyde», le plan le plus érotique du cinéma américain quand elle descend un escalier nue sous sa robe? Elle était sublime pour raconter comment elle fait son métier à la façon dont un menuisier raconte comment il fait le sien. Et comme c'est dur, et comme il faut apprendre, et comme les outils de l'acteur ? ses yeux, sa bouche, ses mains, ses bras ? sont rebelles. Tous les secrets de fabrication d'un personnage sont sur la table. Etrange métier, celui qui consiste à feindre des sentiments qu'on n'éprouve pas. Un tout autre genre d'exhibition égaya un Journal de la Une. PPDA était à Cannes avec Depardieu et sa partenaire dans «Vatel», Uma Thurman. La conversation n'allait pas fort. PPDA demanda qu'on lui envoie les images d'Uma Thurman montant les marches. Elle était de dos, décolletée jusque là où ça ne s'appelle plus le dos et au-delà. L'antenne revint au studio où PPDA était tout remué. Depardieu glissa à la jeune femme : «Vous voyez, Patrick aurait aimé être Vatel.» Pique en réponse, un peu plus tard, du berger à la bergère : «Vous avez dû maigrir, pour tourner ce film!» «Je suis maigre!» , grogna Depardieu. Y a-t-il des extraterrestres? Le physicien Enrico Fermi disait :«S'il y en avait, ils seraient ici.» Jean Heldmann, biologiste et astronome, pense qu'il devrait y en avoir et qu'il faut capter leurs signaux en retrouvant les ondes radio qu'ils doivent émettre avec des moyens très avancés. Alors, avec son équipe, ses collègues étrangers, des télescopes qui balaient le ciel, il cherche. Sur le même plateau, d'autres scientifiques invités de Pivot se posaient la vieille question : pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien? Qu'est-ce qu'il y avait avant le big-bang? Il n'y a pas d'avant, dit l'un. Il n'y a pas de début, dit l'autre. Dieu est le commencement, la cause première, dit un troisième, mais un dominicain, Mathieu Ricard, parla d'une entité créatrice. On n'était pas plus avancé. Si Jean Heldmann et son équipe captent un signal de l'ailleurs, il sait ce qu'il y répondra : «T'as le bonjour d'Alfred.» Mathieu Ricard eut le dernier mot : «C'est bizarre de croire que l'intelligence, c'est d'aller voir ailleurs. L'important, c'est la connaissance intime de soi, la connaissance ultime, l'ombre remplacée par la lumière.» Pourquoi était-ce si important d'être sur les îles de l'Arctique quand les expéditions polaires ont commencé? Et aujourd'hui? Sur les images que Marc Ferro proposait, Jean-Christophe Victor a lumineusement expliqué l'aspect stratégique des choses. Le croira-t-on? Oui, parce qu'on le voit, dans une image brève, le dire lui-même : Paul-Emile Victor détestait la neige? F. G.
Jeudi, mai 18, 2000
Le Nouvel Observateur