sans titre

Critique virulente du pouvoir politique français, qu'elle compare à une monarchie élective, alors même qu'en France et dans le monde de fortes de difficultés s'annonce.
S'il y avait un gouvernement, et si nous étions en république, il serait tombé sur la grève des commerçants.
Comme il n'y en a pas, et que nous sommes en monarchie élective, le gouvernement ne peut pas tomber.
C'est un système ingénieux que M. Pompidou a trouvé là. On ne peut pas attaquer ce qui n'existe
pas. En persévérant dans le non-être, le non-gouvernement durera donc aussi longtemps qu'il plaira à la Cour.
Plus il est transparent, mieux on distingue, évidemment, les ministres qui sont censés composer un groupe solidaire dont les actions seraient coordonnées.
M. Giscard d'Estaing a toujours eu l'art de paraître étranger aux gouvernements dont il est membre. Maintenant, il l'est. M. Royer passe des mois à cajoler les commerçants ; lui les révulse en vingt-quatre heures, sans d'ailleurs l'en informer. Et, pendant que les ménagères étaient empêchées de faire leur marché, où était-il ? A la foire. La Foire de Kuala Lumpur, en Malaisie. C'est ce que l'on peut appeler prendre ses distances.
Quant à M. Chirac, dont on connaît la répugnance proverbiale à se mettre en avant, M. Messmer a appris par la presse qu'il l'avait chargé d'une mission de conciliation. Du coup, on précisait, le lendemain, que cette mission n'en était pas une ; ce qui crée sans aucun doute les meilleures conditions de réussite que l'on puisse imaginer.
Rien de tout cela ne serait réellement alarmant si nous étions en eaux calmes. L'ennui est qu'il se passe, en ce moment, en France et dans le monde, quelques petites choses désagréables. Cette impression de naviguer par gros temps, visibilité nulle, direction inconnue, prévisions impossibles, personne ne peut y échapper complètement. Des ménagères craintives stockent du sucre et des sardines. Réaction dérisoire, sans doute, à l'inquiétude, mais classique. Les femmes savent d'antique mémoire que, dans les moments de trouble, elles sont les premières à écoper.
Quels troubles, quels désordres, de quelle nature, de quelle ampleur, affecteront dans les mois qui viennent l'équilibre du monde, celui de la France et, par ricochet, la vie personnelle de chacun de nous ? Même le pire n'est pas toujours sûr.
Mais s'il y avait un gouvernement, le moment ne serait pas mal choisi pour songer à gouverner.

Mardi, octobre 29, 2013
L’Express