Sans titre

Sur le choc pétrolier et l'augmentation du coût du pétrole
La guerre ? Jeudi matin, nous y étions. Jeudi soir, nous n'y étions plus. Où en serons-nous jeudi prochain... Bof! Vivre à l'heure atomique, c'est savoir, au fond de soi, que tout peut arriver chaque jour. Les Russes à Brest et les B 52 sur Moscou, l'Europe en cendres et la France en poudre. Alors, allons danser ce soir. Un jour, ce sera notre fête. Ou peut-être pas ? L'espoir — car il existe — c'est que l'on finisse par comprendre ce qu'est la guerre. Et ce qu'elle n'est plus.
Elle n'est plus un moyen de conquérir des richesses, lesquelles ne dépendent plus de l'ampleur des territoires. La Hollande est plus riche que la Chine.
Exutoire primitif à l'agressivité, elle est surtout un exercice qui continue de passer, quoi qu'on en dise, pour noble, parce que le « héros » est celui qui défie la mort, et que nous voudrions tous être plus forts que la mort. C'est sans doute pourquoi le courage physique jouit d'une telle réputation, alors que toutes les sociétés sont dures aux couards, lesquels font pourtant preuve de raison. Mais les prestiges de la raison sont ternes auprès des prestiges de celui qui trompe la mort.
Sachant cela, au lieu de prétendre éliminer des rapports humains la violence, la compétition, l'esprit de conquête ou de revanche, le risque, le danger, c'est leur emploi qu'il faut trouver, ailleurs que sur des champs de bataille. Le rugby n'y suffira pas.
La guerre que nous ne subirons pas, cette fois-ci, dans notre terre et notre chair, s'annonce dans nos chaudières, nos réservoirs d'essence, notre économie. Ce n'est pas la pire forme qu'elle puisse emprunter, on en conviendra.
L'arme du pétrole a même ceci de particulier qu'il s'agit d'une arme intelligente — puisque, au lieu de tuer, elle dérange — qui exige une réponse intelligente — puisque, au lieu de tuer en retour, il faut apprendre à s'en passer.
Faire grelotter un temps les anciennes puissances impériales, et les Etats-Unis, de surcroît, cela devrait être plus satisfaisant, pour un esprit arabe, que de faire couler le sang de ses frères, fût-il mêlé au sang israélien.
C'est seulement lorsque l'usage des armes intelligentes viendra à l'emporter sur les armes bêtes, c'est-à-dire meurtrières, que quelque chose de fondamental sera changé dans les relations entre nations.

Mardi, octobre 29, 2013
L’Express