S'insurge contre la fin du Conseil des affaires culturelles, dont les membres ont démissionné collectivement.
Voilà M. Druon bien débarrassé. Son prédécesseur, M. Jacques Duhamel, avait eu l'idée singulière de créer un Conseil des Affaires culturelles, « organe de réflexion, de confrontation et de proposition » à vocation interministérielle.
Le présidait Pierre Emmanuel, poète et académicien. Le composaient trente-cinq personnes aussi diverses que M. Paul Delouvrier, P.d.g. d'Electricité de France, M. Paul Flamand, éditeur, Roger Caillois, le comédien Jean Desailly, etc. « Ni mandataires, ni otages, ni alibis », ils en avaient été assurés.
Le décret, signé le 24 septembre 1971 par le président de la République et son Premier ministre de l'époque, M. Chaban-Delmas, fut ainsi commenté par M. Duhamel : « Si la culture est véritablement œuvre de vie et non pas simple gestion d'un patrimoine transmis, nous devons veiller à ce que les recherches les plus hautes, les plus audacieuses, les plus inattendues se développent (...)
« Si la culture est la chose de tous, elle est aussi et restera, dans la pointe la plus avancée, l'œuvre du petit nombre. Le phénomène de l'élite n'est pas une maladie sociale, mais une nécessité biologique. C'est l'élite fermée qui est un mal... »
On voit qu'il ne s'agissait pas de faire la révolution, mais d'accompagner une évolution.
Or, depuis, il y a eu des élections. Et, de ces élections, M. Pompidou a tiré une leçon. Puisque l'esprit de réforme et d'innovation dont M. Chaban-Delmas eut parfois l'intention ne suffit pas à attirer des suffrages de gauche, à quoi bon s'y forcer au risque de s'aliéner des suffrages de droite ? Mieux vaut s'appuyer sur tout ce que la France compte — et dans la classe ouvrière autant qu'ailleurs — de conservateurs et de cagots. Et mettre leurs représentants au gouvernement. Ce qui fut fait dès avril 1973.
Le Conseil culturel ne voulut pas s'en apercevoir, et, tout enfiévré de zèle, multiplia les interventions et les recommandations. Télévision, cinéma, architecture, poésie, aménagement de la Côte aquitaine, rien ne devait lui être étranger.
Il vient de reconnaître la vanité de son existence en démissionnant dans son entier, après que l'un de ses membres a eu la douleur d'entendre M. Pompidou lui déclarer : « La culture, c'est ce qui se transmet. » Et si vous ne savez pas le récit de Théramène, vous me copierez cent fois : je ne suis pas cultivé.
La démission du Conseil de développement culturel fera moins de bruit que celle de M. Jean Royer, s'il la donnait. Si faible qu'il soit, son budget de fonctionnement pourra être transféré. A la police, par exemple.
Mardi, octobre 29, 2013
L’Express
politique intérieure