Quarante-neuf partenaires, et aussi des milliers d'autres. Elle est précise, Catherine M. Il lui manque le mystère
Les grands voyous dégagent toujours un certain magnétisme. Ils fascinent. Sinon, ils n'iraient pas si loin avant que ça ne craque. Peu importe ? peu m'importe, en tout cas ? la combine montée par Bernard Tapie pour se retrouver actionnaire important, si l'on a bien compris, de l'OM alors que théoriquement il n'a plus un sou. S'il remonte ce club à l'agonie avec des procédés corrects, cela fera des Marseillais heureux, bravo. Des journalistes de télévision ne l'interrogent déjà plus qu'à plat ventre. L'autre soir, on en rougissait pour eux. France3 a fait un travail qui m'a semblé bon sur les lieux de violence et d'insécurité autour de Paris. Insécurité degré zéro. En tout cas, c'est le sentiment avec lequel vit une bonne partie de la population. Alors, prévention ou répression, où est le remède? Eternel débat. Contre l'avis général, un juge de Lyon a dit en gros : la prévention est une histoire de bonne sœur. Il faut s'y prendre autrement. Et il a évoqué Londres et New York. Pour Londres, je crois qu'il fait erreur, il n'y a guère de progrès. A New York, oui, c'est spectaculaire parce que la ville était devenue un coupe-gorge. La municipalité a multiplié les forces de police, et il n'y a plus une vitre brisée, un sac arraché, un pneu crevé sans que le coupable ne soit arrêté sur-lechamp. La sanction tombe sans délai. Le fait est que New York a été nettoyée. Est-ce la bonne méthode pour rétablir cette sécurité que les Français réclament? Accepteraient-ils cette brutalité? Il n'est pas question, en tout cas, de la leur proposer. Remarquable dans ce reportage : les jeunes policiers qui ont demandé leur affectation dans ces lieux dangereux, difficiles, et qui parlent de leur travail comme d'une mission au sens noble du terme. Peu de tâches réunissent d'ailleurs plus de dévouements que celles qui tentent de restaurer une vie normale là où elle ne l'est plus. Cinquante ans après «Histoire d'O», chef-d'œuvre du roman érotique signé par une femme longtemps dissimulée sous le nom de Pauline Réage, «la Vie sexuelle de Cathe-rine M.» explose. Mais cette fois, pas de scandale, rien ne peut plus faire scandale dans ce domaine. D'ailleurs, ce livre est moins érotique que clinique. L'auteur, sympathique, gaie, tranquille, était chez Pivot comme chez elle. Elle assume. Elle assume qu'on la regarde en pensant irrésistiblement à ce que sa bouche, ses mains, ont donné comme jouissance à ses quarante-neuf partenaires, ceux dont elle se souvient. Les autres sont noyés dans la masse des partouzes et des soirées échangistes dont elle est familière. Elle parle de tout cela sans affectation. Dès 18 ans, elle a séparé le sexe et les sentiments, ce qui est commode. On pourrait penser que ce qu'elle décrit n'est pas original. En effet. Sauf que personne, aucun écrivain n'a jamais livré son rapport à la sexualité et à celle de ses partenaires avec cette précision d'horloger. Le sexe est le continent de cette femme, inlassablement parcouru. Personne ne l'a décrit ainsi dépouillé, sans lyrisme, sans passion, sans poésie, sans obscénité. Le tout laissant le lecteur sans émoi. Toute l'étrangeté de son livre est là. C'est consciencieux comme le Guide Michelin. Et que fait-elle dans la vie, cette charmante femme, à part fréquenter assidûment «la confrérie des baiseurs», comme elle dit? Elle est critique d'art, elle dirige «ArtPress», elle aime son mari qui n'est pas jaloux, ça tombe bien, il ne cesse de la photographier nue. Grâce à quoi ce romancier de bonne réputation publie un album où chacun peut découvrir les fesses de sa femme, ses seins et le reste. C'est très joli. La seule chose qui va manquer désormais à son charme, c'est un peu de mystère? Sur le même plateau, aux antipodes, celle qui criait «J'ai 15 ans!», Christine Arnothy, qui a gardé les beaux yeux bleus de sa jeunesse. Elle croit au prince charmant, elle l'a rencontré, épousé et aimé pour la vie. Pivot remarque : «Il était austère?» Elle répond : «Austère? Le jour, oui.» «Vieille bête lubrique à la dérive, épave pria-pique» (pardon : c'est la semaine! ) De qui s'agit-il? De Michel Rocard tel que Daniel Schneidermann le décrit dans «le Monde» à propos de l'émission «Tout le monde en parle». Bizarre, je n'ai pas vu ça. J'ai vu un homme gêné, coincé par un interrogateur arrogant et salace qui voulait lui faire dire si «sucer, c'est tromper?» Sûr que Rocard n'était pas à sa main. Que faisait-il là d'ailleurs? L'émission devrait s'appeler «Plein la gueule». C'est en cela qu'elle attire parce que quelqu'un, de préférence connu, en prend plein la gueule. Rocard a eu son paquet, ficelé par Schneidermann. On ne peut pas dire que le climat social soit joyeux. Où est le bon temps où les communistes et la CGT tenaient les grèves en main ? Aujourd'hui, chacun fait sa petite grève et c'est la chienlit. Entre les deux systèmes, il doit tout de même y avoir une solution raisonnable, l'unité syndicale par exemple... F. G.
Jeudi, avril 12, 2001
Le Nouvel Observateur