oui, les Hébreux ont bien traversé le désert!
Rencontré un député RPR qui n'est pas un ami, mais une vieille connaissance.«Alors, lui dis-je,à quoi avez-vous joué avec la réforme de la justice? Est-ce bien raisonnable? ? La question n'est pas là, dit-il.Depuis que Michèle Alliot-Marie nous préside, nous avons enfin un mot d'ordre dans le parti : FCC. ? Ça veut dire quoi, FCC? ? Faisons chier Chirac! ? Elle vous dit ça comme ça? ? Elle est gamine, vous savez! ? Si c'est votre objectif, félicitations. Il est atteint!» Paris Première a rediffusé opportunément, en ces jours où la haute couture s'exhibe, un joli document d'Antoine Gallien sur Balenciaga, prince des couturiers jusqu'en 1968, année où il se retira en disant : «Les femmes n'ont plus besoin de ce que j'ai?» Balenciaga, en un mot, c'était l'élégance. La vraie, l'élégance pauvre, nue, dépouillée, extrême, qui a disparu emportée dans le tourbillon de Mai-68. Aujourd'hui, le mot lui-même n'a plus d'objet, sauf peut-être en Italie. Paris, secoué, a perdu le leadership de la mode, dont personne, d'ailleurs, n'a hérité. Cependant, de puissants financiers français s'en sont mêlés. La haute couture est au cœur du match Pinault-Arnault. François Pinault a racheté Saint Laurent, qui reste souverain. Bernard Arnault, qui se veut l'empereur du luxe, a Dior dans son escarcelle? Las! Cette saison, l'Anglais John Galliano, chargé de rendre son éclat au nom magique, s'est fourvoyé dans une tentative de provocation : il propose des hardes de pauvresses déchirées, rapiécées, déchiquetées. Inspiration douteuse, réalisation stérile. C'est bien de faire scandale, il faut de temps en temps secouer la poussière. Mais là, Galliano fait flop, c'est tout. Il n'a pas les épaules de sa prétention. Dix-neuf ouvrières auraient quitté l'atelier, écœurées. Dior out? Ce sont des choses qu'on apprend ? qu'on apprenait en tout cas ? quand on est petit : Moïse dans son panier recueilli par la fille du pharaon, les Dix Commandements, la traversée de la mer Rouge, les dix plaies d'Egypte? Est-elle vraie, cette histoire? Depuis des siècles, on en dispute. Les sceptiques soutiennent que si 600000 Hébreux avaient traversé le désert, on en trouverait forcément des traces. Rien. Donc toute l'histoire a été inventée et écrite à Jérusalem deux ou trois siècles plus tard par des scribes juifs. C'est cette thèse qu'un documentaire britannique, réalisé par Jean-Claude Bragard, fait voler en éclats. Il a retrouvé de quoi corroborer entièrement le texte de la Bible. Un décryptage fascinant des pierres et des lieux. Il explique ainsi la neuvième plaie, mystérieuse, quand il y eut «d'épaisses ténèbres?» . Un volcan situé à 800 kilomètres dans une petite île grecque a été le théâtre, au XVIe siècle, d'une gigantesque éruption volcanique. C'est une éruption analogue qui a dû se produire quand «les dieux ont assombri le ciel?». De surcroît, l'éruption volcanique a entraîné un raz de marée. Ainsi «le Seigneur refoula la mer» . Il ne s'agit pas de la mer Rouge, la Bible parle de la mer aux Roseaux. Mais, transmise d'édition en édition et de siècle en siècle, cette erreur de traduction s'est perpétuée. Voilà un document qui fait rêver (Arte). Saisie par la griserie de l'autocélébration? M6 a fêté longuement le dixième anniversaire de «Capital». L'émission d'Emmanuel Chain le mérite, originale, provocante, bourrée d'informations. Là en furent repris les plus fameux extraits et on se divertit à revoir les vendeurs virtuoses fourguer 36 bouteilles de vin ou un appartement à des gens qui n'en veulent vraiment pas, ou à en regarder d'autres se contorsionner pour ne pas dire combien ils sont payés. Il y avait une foule de sujets, c'était vif, drôle. Mis au défi à son tour par un acteur de révéler ce qu'il gagne, Chain a riposté: 50000 francs par mois? L'autre a été démonté. Ce pourrait bien devenir la mode d'afficher son salaire, à l'américaine. Mais pour l'heure, malgré les recommandations du Medef, papy fait de la résistance. F. G.
Jeudi, janvier 27, 2000
Le Nouvel Observateur