Editorial n°1043

Fin des Halles de Paris. Annonce la construction d'un nouveau quartier.
Paris est-il à vous ?
A moi ? A nous ? Non. La capitale appartient désormais à ceux qui font saigner le sol jusqu'à ce qu'il dégorge de l'or.
Or il y avait une fois un quartier où, spontanément, sans gala ni subvention, sans plan ni décret, le tissu de la ville, tressant les jeunes et les vieux, les nantis et les autres, les « cultivés » et les néophytes, bref les Parisiens, s'était reconstitué : le quartier des Halles. Fini le ventre de Paris, son cœur s'était mis à battre sous les pavillons de Baltard.
Sauf une ultime intervention du président de la République, c'est fini.
Le Conseil de Paris, célèbre depuis « Topaze » pour la vertu, la sagesse et le désintéressement avec lesquels ses membres prennent leurs décisions, vient d'en trancher ainsi.
A New York, les Américains manifestent en portant des panneaux : « Sauvez les Halles ! Sauvez ces modèles uniques et superbes de l'âge d'or de l'architecture métallique française ! »
A Paris, ne serons-nous pas capables de protéger notre ville contre un saccage qui n'a même pas le mérite d'être organisé ? Notre ville, la ville qui réunit, qui réchauffe, qui a sa rumeur à elle, ses racines plongées loin dans l'Histoire, Paris, quoi !
Le 10 juin, des bûcherons sont venus abattre les arbres de la rue de la Minoterie. Ils ont trouvé des habitants installés sur les branches. Ils sont repartis en haussant les épaules. Les arbres ont été sauvés. Mais c'était à Genève.
Quand les citoyens se dressent contre les décisions de l'Etat, ils n'ont pas forcément raison. Mais quand l'Etat est incapable de faire comprendre aux citoyens pourquoi il prend ses décisions, il a toujours tort.

Mardi, octobre 29, 2013
L’Express