Sans titre

Avec un humour grinçant, évoque la crise économique et ses « avantages », pénurie de gaz et méthodes burlesques pour y faire face.
Le charme des temps que nous vivons, c'est que l'on s'instruit. Pas un moment pour s'ennuyer.
Quelle est la capitale de l'Arabie séoudite ? Allons, avouez qu'il y a trois mois vous ne saviez pas qu'elle s'appelait Riyad. Confidence pour confidence, moi non plus. Quant au prix du baril de pétrole, brut ou raffiné, aux réserves respectives du Venezuela et de l'Iran, et au rôle du naphta dans la fabrication des pots de yaourt, c'est merveille d'en apprendre chaque jour davantage.

A dire vrai, les plaisirs de la découverte commençaient à s'épuiser, lorsque le gaz est venu à point nommé se substituer au pétrole. Non comme source d'énergie, mais comme source de connaissances. Ah ! la connaissance ! L'azote, l'hélium et les grands méthaniers... On ferait du Rimbaud avec moins que cela. Découvrir les mérites comparés du gaz de Hollande et du gaz d'Algérie, le réseau 9 thermies ou 8 thermies, le rôle des tubes d'aluminium dans les échangeurs de températures en action à Skikda... Grisant.
A propos, ils se sont rompus. Vous croyez qu'à la direction de Gaz de France, entreprise nationale, pas de superprofit mais tout au service du bien public, on avait prévu que ces tubes utilisés selon un procédé nouveau pour liquéfier le gaz pouvaient craquer ? Eh bien, non ! C'est toujours la même histoire. Manque pas un bouton de guêtre, mais, au moment précis où le fuel fait la culbute, on s'aperçoit qu'il faudra deux mois, au moins, bizarre, bizarre, pour réparer ces tubes-là, et pendant ce temps... Pendant ce temps, c'est très simple, il suffira de manger du steak tartare, comme le conseille « France-Soir », et de ne se laver les pieds à l'eau chaude que le dimanche, pour économiser le gaz que nous ne recevrons plus. On est civiques ou on ne l'est pas.
Le steak tartare est ce qu'il y a de plus cher dans ce cher bœuf, la viande crue exigeant, pour être comestible, la qualité ? Si vous préférez le foie gras...
Tout ce que le gouvernement vous demande, c'est de manger froid, et d'avaler la T.v.a., que revoilà chez le boucher.
Finis, les bas morceaux, les vertus du miroton, les charmes de la macreuse, les délices des plates côtes que l'on nous suppliait, mois après mois, de mijoter de préférence aux grillades, pour lutter contre la hausse des prix alimentaires. On ne lutte plus.
On ne lutte plus contre la hausse des prix, on lutte contre la baisse du gaz.
Hâtons-nous d'y croire, avant d'apprendre qu'il y a, décidément, de l'eau dedans.

Mardi, octobre 29, 2013
L’Express