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Peu après l'organisation d'un referendum français sur le marché commun, FG dresse le portrait d'une Europe ennuyeuse car dépourvue de réels pouvoirs. Elle plaide pour la constitution d'un Parlement européen démocratiquement élu auquel chaque pays membre d
Ah ! que l'Europe était belle du temps qu'elle n'existait pas ! Depuis que des institutions européennes se sont mises en place, il semble qu'elles aient uniquement pour objet de discuter du prix du veau sur pied — ou bien est-ce le porc ? — ce dont il ne faut certes pas sous-estimer l'importance, ni pour ceux qui le vendent ni pour ceux qui l'achètent.
Mais les motifs d'exaltation ne sont pas évidents, devant ces palabres entre fonctionnaires. Pour tout dire, l'Europe est devenue ennuyeuse. Quand on fait partie de ce qu'on nomme l'opinion publique, on n'est pas contre, on serait même pour, mais on ne se dérange pas, un dimanche de référendum, pour le dire.
Et quand on appartient à une classe d'âge qui n'a pas connu la guerre, on ne peut pas éternellement s'émerveiller de voir des Français et des Allemands, des Italiens et des Anglais se rencontrer pour faire des affaires ou signer des conventions au lieu de s'entretuer. Même lorsque des rencontres plus ambitieuses ont lieu, comme le dernier « sommet », à l'hôtel Majestic, qui abrita pendant l'Occupation l'état-major allemand, la force du symbole ne tient pas lieu de décisions communes, de nature à ressusciter l'enthousiasme.
Réunissant quelques amis pour présenter son livre, « Agenda pour l'Europe », M. Spinelli, membre de la Commission de Bruxelles, déployait, il y a quelques jours, un lyrisme émouvant pour évoquer ce que pourrait être, selon lui, l'action de ladite Commission, animée par un idéal.
Alors, on a entendu M. Jean Monnet dire doucement : « Avec quelle autorité ? De qui tiendrez-vous l'autorité ? »
Aussi longtemps qu'aucun pays ne déléguera une parcelle de sa souveraineté à un gouvernement européen issu d'un Parlement européen démocratiquement élu, il n'y aura pas d'autorité. Donc, pas de politique européenne. Donc, pas d'Europe. Seulement quelque chose comme un grand magasin à succursales multiples, dont les gérants n'arrivent pas à se mettre d'accord.
Personne ne peut se sentir citoyen d'un magasin.

Mardi, octobre 29, 2013
L’Express