L'Onusie vous parle

Imagine le rapport de l'ambassadeur de l'ONU sur la France
L'Onusie vous parle

par Françoise GIROUD

C'EST un garçon charmant. Il sappelle M. Tchik et il est Onusien. Ce n'est ni un vice ni une maladie. Onusien signifie ''citoyen de l'Onusie'', cette nouvelle contrée qui ouvrira le 21 septembre son ambassade au Palais de Chaillot.
M. Tchik vient en Europe pour la première fois. Toutes les semaines, il envoie un petit rapport en Onusie sur ses impressions de voyage.
Il m'a fait l'amitié de me communiquer son premier rapport, strictement confidentiel. Je ne pousserai pas l'indiscrétion jusqu'à vous le traduire intégralement d'onusien en français. Mais certains passages m'ont paru édifiants et dignes d'intérêt. Voici donc quelques-unes des lignes que M. Tchik, Onusien, consacre à la France :

De la politique :
Pays admirablement organisé. La preuve, c'est qu'il se passe très bien de gouvernement. De temps en temps, le Président en forme un pour utiliser une quantité de vieux serviteurs auxquels il convient d'assurer une retraite honorable. Au bout d'un temps, ils se disputent entre eux. Parfois, ils s'en vont en claquant la porte. Mais il suffit de dire : ''Le général est là...'' et ils reviennent. C'est très commode.

Des salaires :
Il y a 11 millions de ''salariés''. Salarié est une expression intraduisible en onusien. Elle signifie à peu près : individu qui reçoit, en échange de son travail, une somme correspondant à environ aux deux tiers de ses besoins vitaux.
Quand le salarié se fâche et réclame le troisième tiers, on dit qu'il fait ''la grève''. Les uns lui expliquent alors que le salarié russe vit encore moins bien que lui. Les autres lui expliquent que le salarié russe vit beaucoup mieux que lui.
D'une enquête personnelle, il ressort que le salarié français ne vit pas en Russie, mais en France, ce dont personne ne semble avoir conscience. Et que, en conséquence, ces comparaisons le laissent froid.

De l'éducation :
L'éducation se fait essentiellement par le cinéma et par la presse spécialisée. On s'intéresse particulièrement, cette semaine, à la projection d'un documentaire sur les... (Note du traducteur. - Là, un mot illisible. J'ai cru comprendre qu'il s'agissait d'une de ses maisons que l'on appelait closes avant de les fermer.)
Titre : Dédée d'Anvers. L'entrée de la salle où il est projeté a été interdite aux moins de 16 ans, de façon à encourager toutes les jeunes filles et tous les jeunes gens à s'y précipiter. On estime ici que, à 16 ans, une jeune fille ne doit rien ignorer de la prostitution et de ses agréments, qui sont scrupuleusement détaillés.
Pour un documentaire, il m'a néanmoins semblé incomplet : il s'arrête toujours au moment où ça pourrait devenir intéressant.
La presse éducative a longuement commenté, avec photos à l'appui, l'exploit d'une jeune fille tout à fait remarquable qui a reçu le titre de ''Miss Poubelle''.
La poubelle est une boîte dans laquelle on dépose les ordures. Je suppose donc qu'elle a été couronnée parce qu'elle vide les poubelles avec une célérité particulière.
Excellent exemple pour les ménagères.

De l'amour :
J'ose dire que, sur ce point, j'ai vaillamment soutenu la comparaison avec les Français auxquels nous faisons, en Onusie, une réputation excessive. Mon succès est incontestable.
A ce propos, il me serait agréable de recevoir par la valise diplomatique encore quelques douzaine de bas nylon.
(A suivre.)

Mardi, octobre 29, 2013
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