L'Editorialiste et le prince

Critique littéraire. Publication des 115 articles écrits par Beuve-Méry, réunis en un recueil « Onze ans de règne ». Editorialrialrials où il ne se prive pas de tancer De Gaulle.
Austères dans la forme, sévères dans la pensée, les cent quinze articles de Hubert Beuve-Méry, fondateur du journal « Le Monde », réunis en un recueil sont des modèles du genre.
Ecrits entre 1958 et 1969, ils couvrent « onze ans de règne ». Le règne de Charles de Gaulle.
A travers ses lecteurs, l'Editorialiste interpelle le Prince, le reprend, le tance, assuré qu'en fait de pouvoir il ne lui cède en rien, et que la « Une » du « Monde » vaut bien l'Elysée. Ne fût-ce que parce qu'on y reste, alors qu'à l'Elysée on passe.
D'ailleurs, qu'est-ce que le pouvoir ? « Peut-être, après tout, « rien ne vaut-il rien ». Mais, dans ce cas, qu'importe que cette chose-ci et celle-là meurent, et nous tous ? »
C'est de Gaulle qui l'écrit, dans une lettre à Beuve-Méry, datée du 6 août 1958. Il semble que, sur ce point au moins, il y ait eu quelque parenté d'esprit entre les deux hommes.
Peut-être est-ce précisément ce par quoi ils se ressemblent qui les a séparés. Vit-on jamais un Guide accepter de se laisser guider ?
En reproduisant le portrait blessant que François Mauriac, atteint dans son gaullisme ardent, traça de lui, Beuve-Méry, qui ne déteste pas donner des leçons, montre, en passant, qu'on ne le prendra jamais en défaut en matière d'information.

Mardi, octobre 29, 2013
L’Express