Comment la tempête n'éclaterait-elle pas à Gaza, cette immense prison où vivent dans le désespoir un million de Palestiniens...
Du tac au tac : c'est la nouvelle version de la cohabitation. Je tire, il tire. Expérimentation hasardeuse, comme dirait Jacques Chirac. Est-ce bien raisonnable? Gaza. Un nom que véhiculent parfois les bulletins d'information. Mais que savons-nous de cette enclave palestinienne où vivent un million d'hommes qui croyaient être libres après la signature des accords d'Oslo? Gaza est une immense prison. C'est ce qui ressortait d'un reportage désolant de la Une. Le désespoir et l'humiliation systématique sont, là, le lot quotidien. Les colons prospèrent, mais les exportations palestiniennes sont régulièrement bloquées. Il est interdit aux Palestiniens de créer un port, interdit d'utiliser l'aéroport qu'ils ont construit, interdit de circuler librement entre Gaza et le reste des territoires palestiniens en Cisjordanie, interdit de circuler sur la route asphaltée qui traverse le territoire, réservée aux voitures israéliennes. Les Palestiniens, qui sont théoriquement chez eux, doivent se déplacer sur une piste de sable et de cailloux qui longe la route de l'occupant. «Chronique d'une tempête annoncée», tel était le titre de ce reportage. Comment la tempête n'éclaterait-elle pas un jour, à Gaza? Et à quoi pense donc M. Netanyahou, s'il lui arrive quelquefois de penser? Albert Speer est ce ministre de Hitler qui a été épargné par le tribunal de Nuremberg. Ministre de l'Armement, il a eu l'intelligence de plaider coupable. Il s'en est sorti avec vingt ans de réclusion pour avoir affecté des déportés par milliers à la production de guerre, dans des conditions abominables. Le trop fameux tunnel de Dora, c'est lui («le Sens de l'histoire»). Que savait-il de la solution finale? Un document semble indiquer qu'il n'a pas pu ignorer sa mise en œuvre. Lui dira, ambigu : «J'aurais pu savoir, j'aurais dû savoir.» Albert Speer, grand bourgeois fortuné, manifestement rongé par la culpabilité jusqu'à ses derniers jours, n'était pas une brute ordinaire. Ce n'est pas une excuse. Au contraire. Une agréable conversation de salon a réuni, chez Pivot, Patrick Rambaud, ployant avec humour sous le poids de ses lauriers; Edouard Balladur, martelant son obsession : la France s'adaptera dans les vingt ans qui viennent au reste du monde, ou nous serons laminés; Jack Lang exaltant la grandeur, dans tous les sens du mot, de François Ier et l'inspiration qu'il a su tirer de l'Italie, centre du monde; Anne Sinclair, rayonnante et habile à se faire entendre un peu plus que les autres; Philippe Alexandre enfin, quasiment muet. On le regretta. Sa férocité est réjouissante quand on n'en fait pas l'objet. Ce petit aréopage distingué fut de bonne compagnie. Avec Jean-Louis Debré, invité de Michel Field, ce fut un autre ton. Il a des clairons dans la voix. C'est, d'une certaine manière, assez touchant, ce patriotisme à fleur de peau, cette vénération de l'Etat dont il se veut le fervent serviteur. On ne sait d'où vient que l'on a cependant envie de le chahuter dès qu'il se met à vibrer. Michel Field lui a apposé Bertrand Tavernier, défenseur des sans-abri, contestataire du projet de loi Chevènement sur l'immigration. Au milieu d'un échange un peu rude, Debré feignit de le tutoyer. Vieilles connaissances. Cela jeta un froid. On ne savait pas que Tavernier fréquentait les ministres de l'Intérieur! Il n'a pas fini de se faire taquiner avec ça. Faire fortune? Prenez une raquette, un vélo, un ballon, elle est là, aujourd'hui, la fortune, à condition bien sûr d'avoir quelques dispositions et du courage. En se penchant sur les salaires des sportifs, «Capital» a cité des chiffres impressionnants (M6). Pour n'en citer qu'un, Richard Virenque, le cycliste, est payé 500000 francs par mois par les montres espagnoles Festina, son mécène. On ne va pas enfiler des chiffres, ceux du football, ceux de l'athlétisme, tous mirobolants. Simplement, que les jeunes ambitieux réfléchissent avant d'essayer Polytechnique. C'est ailleurs que l'on s'éclate aujourd'hui. Quiproquo sur FR3: on attendait Antoine Gaudino, c'est Jacques Floch, député PS de Loire-Atlantique, qui est venu, et personne ne s'en est aperçu. Sauf le député, qui protestait :«Je ne suis pas Gaudino, je ne suis pas Gaudino?» Cela dura cinquante secondes à l'antenne, drôles. Délices pervers du direct. F. G.
Jeudi, novembre 27, 1997
Le Nouvel Observateur