Le Vatican n'a pas mêlé sa voix à ceux des évêques «repentants». Quant à Jean-Paul II face aux Brésiliennes...
Tant et tant de chaînes et, pour finir, si peu à voir. Du moins qui soit à mon goût. Ce qui ne signifie pas que mon goût soit le bon, ni qu'il soit par tous partagé. Simplement on s'étonne : est-il vraiment si difficile de concevoir, par exemple entre 19 et 20 heures, heure de grande écoute, une émission convenable? Ce n'est pas un hasard si le public renâcle à regarder ce qu'on lui propose, depuis la rentrée, en guise d'«access prime time», comme on dit dans le jargon du métier. C'est indigent. Celui qui s'en tire le mieux, pour finir, c'est Guillaume Durand sur Canal+. Les affamés de politique peuvent suivre de préférence sur LCI les entretiens de Ruth Elkrief. Là, tout dépend de l'interlocuteur. Certains sont décourageants. Mais laissons les récriminations. Grâce à Robert Badinter, invité par Michel Field, les points chauds de la semaine ont été traités avec sobriété mais sans concession. Le projet de loi sur l'immigration, qui soulève la colère des pétitionnaires? Il comporte des avancées indiscutables, mais certaines dispositions ne sont pas acceptables : il ne les votera pas. Les propos du pape au Brésil : saisissants, quand on pense aux milliers de Brésiliennes qui meurent d'avortement. L'acte de repentance des évêques de France : une déclaration admirable. Le silence du Vatican reste, en revanche, assourdissant. L'Algérie : une jeune femme algérienne est venue demander l'envoi d'une commission d'enquête; vous avez raison, dit Badinter. Ce qui se joue en Algérie, c'est une certaine idée de l'humanité. Les coupables doivent savoir que leurs crimes sont imprescriptibles, qu'ils ne connaîtront jamais la paix, qu'ils seront traduits devant un tribunal international. Papon, enfin : un procès nécessaire. Tout cela fut dit calmement, sans effets de voix. Du meilleur Badinter. En finira-t-on jamais avec les séquelles de la guerre? «Envoyé spécial» a diffusé un documentaire de la BBC impressionnant au sujet de la Suisse. Trop impressionnant peut-être, avec ses plans de cadavres accumulés. Que les banques suisses aient raflé tout l'argent des déportés déposé dans leurs caisses, le vol est patent. Que les Suisses, pour s'assurer les bonnes grâces de Hitler, aient fermé leurs frontières à ceux qui cherchaient refuge chez eux, cela est avéré. Sont-ils allés plus loin, ont-ils toléré que des convois de déportés traversent leur territoire? Peut-on dire que sans leur contribution active, financière et industrielle, à l'effort de guerre allemand, celui-ci aurait été abrégé d'un an? Les autorités suisses réfutent furieusement ces allégations. En tout cas, ce n'est pas seulement la cupidité, c'est l'honneur de la Suisse que cet implacable document anglais met en question. Avec Bernard Pivot, on navigua dans les hauteurs. La science et Dieu sont-ils compatibles? C'est la question à laquelle Claude Allègre, ministre de l'Education, le professeur René Frydman, gynécologue, et le père Madelin, jésuite, étaient invités à répondre. Claude Allègre fut clair et net : «Il y a deux types d'explication du monde. Et il n'y a pas entre elles d'intersection.» Suivit un petit topo sur Galilée et consorts qui eurent, comme on sait, quelques difficultés avec l'Eglise. «Tout le problème vient de la Genèse, de la lecture littérale de la Genèse, dit le père Madelin. Elle met l'homme au centre de la création. Alors ce qui vient avant lui ...» On passa à l'âme... Quand se manifeste-t-elle aux yeux de l'Eglise? Au moment de la fécondation? Plus tard? Saint Thomas d'Aquin a répondu : après 40jours pour les garçons, 80 pour les filles... C'est ce que dit aussi le Talmud. Claude Allègre bondit :«Il n'y a pas d'âme sans cerveau. Il y a d'une part la mécanique du cerveau et d'autre part la logique du cerveau qui n'est pas matérielle. Ce pourrait être ça, l'âme.» «Une dimension qui n'est pas réductible au matérialisme», ajouta René Frydman qui est athée mais observe chez certaines de ses patientes une demande religieuse qu'il respecte. Conclusion : entre la science et Dieu, l'entente cordiale n'est pas pour demain. Dimanche, on pouvait voir à la même heure un bon document sur la révolution russe ou un autre, du «National Geographic», sur les gorilles. Fatiguée des hommes, j'ai regardé les gorilles. Ce fut un pur plaisir. F. G.
Jeudi, octobre 9, 1997
Le Nouvel Observateur