Consommation de pétrole en France à la veille d'une hausse envisagée de son prix.
Quel gâchis, mais quel gâchis ! C'est d'énergie qu'il s'agit, naturellement. A quoi d'autre le mot gâchis pourrait-il se rapporter aujourd'hui ? Pas de mauvais esprit, soyons unis mes frères, convergeons, convergeons. Et plutôt que de s'intéresser à l'avenir respectif de MM. Giscard d'Estaing, Chirac et Mitterrand, également incapables de faire jaillir le pétrole du parc de l'Élysée, parlons de choses sérieuses.
Du train où vont les émirs et les ayatollahs, l'essence - pour ne parler que d'elle - sera bientôt à 6 F.
Il y a cinq ans que les économies d'énergie ont été recommandées aux Français avec force publicité. Depuis, a-t-on vu quelqu'un réduire sa consommation personnelle, dévisser une ampoule, ou supprimer un radiateur électrique ? Jamais il n'y eut plus de voitures sur les routes que pendant le week-end pascal ni de chaudières allumées dans les résidences secondaires.
Alors, mauvais citoyens, les Français? Pas plus que les autres. Mais sensibles, peut-être à l'incohérence.
Tenons pour rien les grands yachts et les petits qui feront, cet été, le plein de mazout tandis que les hélicoptères continueront de déposer les skieurs de luxe sur les sommets enneigés. Et passons au plus courant.
Chaque ménage français jette 250 bouteilles de verre par an. La fabrication d'une bouteille exige un demi-litre de pétrole. Chaque foyer français jette 160 kg de papier par an. Un kilo de papier « vaut » deux tiers de litre de pétrole. Quand s'est-on employé à les récupérer ?
En Suède, les immeubles sont munis de trois poubelles : une pour le verre, l'autre pour le papier, la troisième pour les produits biodégradables qui se transforment en engrais. Le ramassage est simple, le civisme à la portée de tous.
A propos de papier, un ministre a fait diffuser ici, en 1975, une circulaire donnant instruction aux administrations d'économiser le papier en utilisant recto-verso. Savez-vous comment se présentait cette circulaire? Sur deux feuillets, imprimés au recto seulement.
Le téléviseur qui dispense la propagande débile au sujet des économies d'énergie utilise trois fois plus de courant que les appareils japonais. Quand a-t-on imposé aux constructeurs de modifier leur fabrication ? Mais il faudrait deux pages pour énumérer les moyens techniques mis en œuvre ou en voie de l'être, dans d'autres pays, pour réduire le gaspillage, mettre au point des énergies de substitution et limiter ainsi — sinon supprimer — le recours aux centrales nucléaires. Michel Bosquet les a recensés, dans un article impressionnant.
Selon toutes apparences, la France a fait un autre choix. Toutes les ressources dont nous disposons sont investies dans le développement de l'énergie nucléaire. Le nucléaire, il paraît que c'est l'avenir. Ne demandons pas lequel. Mais que l'on ne s'étonne pas, alors, si, dans leur sagesse, les Français se disent : « Profitons-en pendant que ça dure... »
Mardi, octobre 29, 2013
Le Journal du dimanche
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