Après la venue d'Indira Gandhi, tirant l'alarme auprès des journalistes sur la situation de son pays et les risques de la guerre.
Menue, droite, maîtrisée mais vive, la nuque douce, les mains fines mollement immobiles, ce qui est le signe même du calme profond, Mme Indira Gandhi nous parlait, lors de son récent passage à Paris, de la guerre.
La guerre non pas inévitable, mais possible, sinon probable. La guerre où parleront des armes que nous fabriquons, exportons, vendons ici et là, à concurrence de 7 milliards 210 millions de Francs en 1970, selon une récente étude publiée à Stockholm.
Nous étions quelques-uns, réunis autour d'elle dans une maison amie. Ce qu'elle disait de la situation du pays dont elle est le chef, ce qu'elle racontait des 10 millions de réfugiés qui se sont agglutinés en Inde, entendu dans le moelleux d'un appartement parisien, devant un Picasso, sous un Max Ernst, semblait quasiment irréel.
Si bien que lorsqu'elle posa, à son tour, quelques questions sur la situation ici, nous eûmes peine à répondre, tant le décalage entre les événements qui tissent l'actualité française et ceux qu'elle venait d'évoquer les rendait incommensurables.
Ils sont, aujourd'hui plus encore, incommensurables. Mais une conflagration au cœur de l'Asie n'effacera malheureusement pas davantage les grenouillages du Sdece et de ses agents, que la crise monétaire ne peut effacer les manigances de quelques fraudeurs de haut vol.
M. Michel Debré, véhément à son habitude, vient de faire vivement reproche à la presse d'accorder place et attention à ce qui est, selon lui, « de l'ordre de la concierge et de la quinzième page d'un journal de bonne tenue ». Le porte-parole du gouvernement, brodant sur le même thème, pressait le lendemain les journalistes de parler plutôt des affaires importantes qui se passent dans le monde et qui auront « plus de conséquences pour notre avenir ».
En est-il tellement certain ?
Vers 1787, de quoi la presse française, si elle avait existé, aurait-elle dû davantage s'inquiéter ? De l'invasion des Pays-Bas par l'armée prussienne ? Ou de l'affaire du Collier de la Reine ?
Mardi, octobre 29, 2013
L’Express
politique étrangère